Revolut devient officiellement une banque en France. Grâce à sa licence bancaire lituanienne, l’entreprise va pouvoir élargir son offre et peut-être, enfin, atteindre la rentabilité.
Jusqu’à présent, Revolut opérait en France sous le statut d’établissement de monnaie électronique, un statut agréé par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Avec cette autorisation, l’entreprise britannique pouvait fournir des comptes courants associés à des cartes de paiement à autorisation immédiate. Mais c’est tout. Les fonds de ses clients étaient conservés et garantis par un autre établissement, titulaire, lui, d’une licence bancaire.
Afin de pouvoir poursuivre ses activités en dehors du Royaume-Uni après le Brexit, Revolut avait dû installer son siège social dans un pays membre de l’Union Européenne. Comme de nombreuses fintechs, elle avait jeté son dévolu sur la Lituanie et créé Revolut Payments UAB. C’est sous cette entité qu’elle officie en France et dans l’espace économique européen depuis février 2021.
C’est donc en Lituanie qu’elle a demandé et obtenu, en 2018, une licence bancaire. Celle-ci est désormais enregistrée et reconnue en France. Revolut Payements UAB devient donc Revolut Bank UAB, une organisation habilitée à exercer comme établissement de crédit dans l’hexagone. Cerise sur le gâteau, Revolut est dorénavant autorisée à se présenter comme une banque ou une banque en ligne par la Banque Centrale Européenne (BCE) et l’ACPR.
Dans les jours à venir, les clients français pourront demander le transfert de leur compte Revolut vers Revolut Bank. La manœuvre se fera depuis leur smartphone en quelques clics et sera proposée par un message à l’ouverture de l’application.
Ce nouveau statut permet à Revolut de détenir les fonds de ses clients sans passer par un tiers. En cas de faillite, les capitaux sont protégés par la Banque de Lituanie. Les dépôts sont couverts à hauteur de 100 000 euros, comme la réglementation européenne l’impose. Une nouvelle responsabilité pour la banque qui devrait passer inaperçue pour ses abonnés.
Autre nouveauté qui devrait être plus remarquée : les utilisateurs vont devoir changer d’IBAN. Encore. À son lancement en France, en 2017, les comptes Revolut étaient domiciliés au Royaume-Uni et dotés d’un identifiant britannique. Suite du Brexit et au déménagement à Vilnius du printemps 2021, l’indicatif anglais a été remplacé par un indicatif lituanien. Maintenant, la banque en ligne procure un IBAN français. De quoi soulager tous ceux qui rencontraient des difficultés à faire enregistrer leurs coordonnées bancaires étrangères auprès de leur employeur.
Mais en passant du statut d’établissement de monnaie électronique à celui d’établissement de crédit, Revolut gagne surtout le droit de proposer de nouveaux produits à ses clients comme des comptes avec autorisation de découvert, des cartes à débit immédiat ou différé et des crédits. C’est déjà le cas en Pologne et en Lituanie où elle commercialise des prêts personnels et des cartes de crédit. Ces prestations, plus lucratives, aideront peut-être la banque à devenir enfin rentable.
Car Revolut a beau compter 1,5 millions de clients en France et 16 millions dans le monde, ses comptes sont toujours dans le rouge. En 2020, son déficit était de 230 millions d’euros soit une hausse de 83 % par rapport à 2019.
Cependant, la néobanque affiche des signaux encourageants. En 2020, son chiffre d’affaires était de 300 millions d’euros, soit une croissance de 57 % par rapport à l’année précédente. Et pour la première fois, elle a atteint l’équilibre financier au premier trimestre 2021. De bons résultats obtenus notamment grâce aux abonnements premium, aux paiements par carte bancaire, à l’activité d’échange de cryptomonnaies et à ses choix stratégiques : en mars 2021, elle a renoncé, temporairement, à s’implanter au Canada en raison des difficultés à obtenir une licence bancaire et du manque d’opportunités.
Forte de cette dynamique, Revolut conserve la confiance des investisseurs. Pour sa dernière levée de fonds, en juillet 2021, la licorne a réussi un tour de table de 670 millions d’euros. Sa valorisation boursière atteint 28 milliards d’euros, soit 7 milliards de plus qu’une banque comme la Société Générale.
Avec sa licence bancaire lituanienne, Revolut quitte le monde des fintechs pour entrer en concurrence directe avec les banques en ligne françaises comme Orange Bank et Boursorama. Sa capacité à innover sera-t-elle suffisante pour lui permettre de se faire une place au soleil ?